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Minos et compagnie
14 mars 2010

Moins que rien

Ou de ma contribution au jeu d'écriture lancé par M1, Madame Kévin et Lizly sur Jeux d'écritures. Le blog à mille mains

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© Robert Lubanski

Nouveau pays, nouvelle ville.

J'en ai marre de tous ces voyages, mais elle ne veut rien entendre. Elle n'arrête pas de me dire que c'est pour nous qu'elle le fait. Qu'il faut qu'elle travaille tant qu'elle le peut encore. Qu'il lui reste si peu de temps.
Qu'il faut que je sois patient. Après, ce ne sera rien qu'elle et moi. Alors je la suis. Pourtant ce que j'aimerais être ailleurs ! Mais vivre loin d'elle c'est pire que tout.
J'ai bien essayé une fois. Je suis resté des jours sans nouvelles. Quand elle a fini par appeler je me suis mis à chialer et j'ai pris le premier avion pour la rejoindre. Pour être près d'elle, de son souffle, de sa voix, de sa main qui m'apaise.

Et nous revoilà. C'est encore la même histoire. Partir de jour comme de nuit,
marcher toujours trois pas derrière. Prendre une chambre d'hôtel. L'observer de ma fenêtre, guetter le moindre signe d'elle. Vivre pour la minute que je pourrai voler à son client. Ne pas faire de vague.
Mais putain qu'est-ce que j'aimerais leur casser la gueule à tous ces mecs qui posent leurs mains sur elle ! Ces types qui puent l'alcool et le cigare froid et qui croient que leur fric peut tout acheter y compris son amour.

Elle a fini sa conversation, donne un coup de tête pour me montrer la direction. D'ici deux minutes nous serons arrivés à son hôtel. J'ai envie de gerber. Comment lui faire comprendre que je n'en peux plus, que je voudrais me poser, avoir un chez nous, des  copains, prendre le petit-dej avec elle chaque matin ?

Son client l'attend à la réception. Surtout ne pas me faire remarquer de lui.

Ça m'est arrivé une fois avec un autre gars. J'étais en colère. Elle venait de m'annoncer qu'ils partaient quelques jours, qu'il valait mieux que je reste à l'attendre, qu'elle me recontacterait dès son retour. Je suis allé frapper à la porte de leur chambre. Pour quoi faire ? Je n'en sais rien moi-même. Elle m'a poussé violemment dehors. Le gars s'est mis à gueuler, à lui demander qui j'étais. Elle a répondu que je n'étais rien qu'un client trop collant. Il s'est jeté sur moi, m'a cogné. Elle a refermé la porte comme si de rien n'était.

J'ai eu mal pendant des jours. Mal qu'elle m'ait repoussé.
Mal qu'elle me fasse passer pour l'un de ces vieux vicelards qui la baisent comme un bout de viande. Mal qu'elle ne m'ait pas rattrapé, qu'elle ne se soit pas enfuie avec moi loin de toute cette merde.

Mal qu'elle ne lui ait pas dit qui j'étais.

Elle l'embrasse tendrement, me sourit. Les portes de l'ascenseur se referment.
Je pourrais me tirer, ouais. Mais qui veillerait sur elle ?

"Hello. Is it possible to stay in your hotel for a couple of days ?"

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Commentaires
L
Merkiiiii les filles !<br /> J'ai hâte de lire vos contributions car vous ne manquez vraiment pas de talent !
B
Génial tu te lances dans le jeu d'écriture !!<br /> Bravo pour ce récit qui colle parfaitement à l'ambiance de la photo et à la dégaine de cette fille.
A
Bravo! Quel talent! Et quelle histoire!
L
Merci Sophie L. :-)
S
Très prenant ce texte. Belle réussite!
Minos et compagnie
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